Qu’est-ce que le syndrome de l’imposteur ?
Pour bien comprendre ce phénomène, commençons avec un peu de théorie avec Pauline Rose Clance, psychologue américaine, qui a été la première à étudier ce phénomène en 1978.
En quelques mots, le syndrome de l’imposteur au travail ça donne quoi :
La sensation désagréable de douter en permanence de ses capacités, de ne pas se sentir légitime dans son statut actuel, et de ne pas réussir à s’approprier ses succès
Non, ce ne sont pas des adeptes de la pensée cartésienne à vouloir douter de tout, mais bien un manque de légitimité qui nourrit ce mal-être. Il s’agit généralement de personnes qui sont très perfectionnistes et qui ont un manque de confiance et d’estime de soi. Elles vont donc facilement se dévaloriser et survaloriser les compétences d’autres collaborateurs.
Par exemple, un employé qui occupe un poste à responsabilités au sein d’une entreprise (manager, responsable communication/administratif/financier/RH) peut avoir l’impression qu’il a « seulement eu de la chance » plutôt que d’exprimer objectivement le succès de sa réussite. À coté de ça, « l’imposteur » aura l’impression que son collègue, qui a eu un parcours similaire, aura beaucoup plus mérité sa prise de poste : « il fait plus d’heures », « il a de meilleurs résultats qualitatifs »…
Le syndrome de l’imposteur au travail n’est autre qu’un mélange de biais cognitif (biais de négativité, biais de confirmation, etc.) qui affecte la représentation que « l’imposteur » a de lui-même et des collègues qui l’entourent. C’est pourquoi, votre collaborateur qui souffre de ce syndrome et qui a l’impression de duper son entourage professionnel et personnel, aura peur d’être démasqué.
Ce qui peut entrainer de nombreuses dérives comme un acharnement au travail (burn out), ou au contraire un désengagement, une aversion à la prise de risque, une mauvaise communication auprès des membres de son équipes… parce que oui, ce mal-être peut être contagieux.
Le syndrome de l’imposteur, ce n’est pas de l’humilité de très haut niveau. C’est bien une lecture incohérente de son environnement qui a des conséquences, au début peu visibles, mais qui peuvent devenir assez lourdes pour votre organisation sur du long terme.
En tant que manager, comment savoir si votre collaborateur subit une mauvaise passe ou s’il est dans le cercle vicieux du syndrome de l’imposture ?
Comment détecter le syndrome de l’imposteur au travail : 4 comportements à surveiller
Nous pouvons identifier 4 comportements qui se manifestent lorsque l’un de vos collaborateurs présente des signes du syndrome de l’imposteur. Des comportements qui s’accumulent et qui font effet boule de neige, ce qui rend difficile pour vos collaborateurs de sortir de ce cercle vicieux.
Passez de la théorie à la pratique
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Être un acharné du travail
Un trait classique de « l’imposteur » est d’être perfectionniste. Même si c’est quelque chose d’assez commun dans le monde du travail, la personne souffrant de ce syndrome cherche à combler son « manque » d’expertise ou de légitimité en enchainant les heures. Il peut aussi pousser son travail sur chaque sujet, chaque projet, trop loin pour se prémunir du moindre défaut, du moindre risque. En gros, le fait de se rattacher à une donnée quantitative (par exemple les horaires de travail), va le rassurer et lui permettre d’avoir une représentation concrète de son labeur.
Il est possible qu’un de vos collaborateurs ressente ce besoin de faire des heures, ou de prouver qu’il en fait plus que les autres pour se sentir légitime. Comment le repérer assez facilement en tant que manager ?
Faites le test sur une semaine où votre collaborateur travaille sur un sujet où il est bon. Et demandez-lui de couper plus tôt, genre 18h au lieu des 19h-20h habituelles. Si il n’y arrive pas, alors vous avez votre réponse.
Avoir un collaborateur qui s’implique trop, en quoi est-ce problématique me direz-vous ? De 1, faire des heures ≠ être productif. S’il travaille en plus sur d’autres sujets, c’est différent, mais s’il passe plus de temps que nécessaire sur tous les sujets, c’est soit de l’incompétence chronique et vous n’êtes pas sur le bon article, soit on y est. Et de 2, pousser un rythme de travail aussi conséquent peut amener votre collaborateur à faire des erreurs par un manque de prise de recul, ou carrément à l’épuisement, ou autrement dit, si on pousse la dérive jusqu’au bout, au burn out.
Ne pas être soi-même
Le deuxième comportement qu’adopte un « imposteur » est de celui de « porter un masque ». Pour préciser un peu plus ce concept, les personnes atteintes de ce trouble vont faire en sorte de faire ou dire ce que l’on attend d’elles. Ces personnes se positionneront plutôt en soutien d’une idée plutôt que de la challenger.
Comportement généralement assez commun pour vos nouveaux collaborateurs, ou en période de changement. Il y a souvent une phase de transition avant que vos collaborateurs ne se sentent complètement à l’aise de se comporter librement en affichant leurs opinions et leurs idées. En tant que manager, à vous de vérifier que chaque collaborateur se sente bien dans votre environnement.
Certes ce type de comportement peut être facilitateur pour certains groupes, mais à plus grande échelle, cela peut freiner des processus, et limiter grandement la délégation ou l’innovation car ces personnes évitent à tout prix les prises de risque.
Être le parfait élève
Avoir un comportement exemplaire permet à « l’imposteur » de se rassurer et recevoir des récompenses de la part de son environnement (un compliment, de la reconnaissance, un bonus, etc.). Cependant, c’est une quête impossible à satisfaire car le signal positif s’efface du moment qu’un nouvel événement apparait (un nouveau projet qui démarre, une réunion de restitution, etc.).
Avoir des collaborateurs qui veulent toujours bien faire, c’est tentant non ? Alors oui, mais dans le cas d’un syndrome de l’imposture, cela nécessite que vous, en tant que manager, soyez constamment sollicité pour approuver, valider et rassurer. Bien que le contrôle fasse partie du rôle du manager, l’excès de ce comportement va vous prendre beaucoup de temps, et limiter fortement l’usage du management délégatif (on en parle juste après !).
Être le plus modeste possible
La modestie est un autre trait que « l’imposteur » incarne avec ses pairs. Cela peut se manifester de différentes manières : ne jamais accepter le crédit d’une action, minimiser ses efforts, mettre quelqu’un d’autre en avant… Bref la lise est longue.
Même si on ne recherche pas forcément des collaborateurs prétentieux, avoir la capacité d’analyse et un regard objectif sur les actions que l’on mène est nécessaire pour tout type de poste à responsabilités. Cela permet à la fois de prendre de la hauteur, de planifier une activité dans les bonnes conditions et d’être capable d’ajuster ces actions.
Managers, soyez donc ouverts à ce qu’il se passe autour de vous. Même si le syndrome de l’imposteur n’a de syndrome que son nom, avoir conscience des dérives de ces comportements est nécessaire pour assurer une cohésion d’équipe et manager correctement vos équipes.
Comment accompagner et manager vos collaborateurs atteints du syndrome de l’imposture ?
Le but n’est pas de savoir comment soigner le syndrome de l’imposteur, car être manager ne veut pas dire être clinicien, même s’il y a une part de psychologie dans le job 😉
Notre objectif est de vous donner les clés pour que vous puissiez accompagner vos collaborateurs atteints de ce syndrome, ou encore d’autres personnes qui se mettront à douter de leurs capacités. N’oublions pas que ces épisodes touchent plus de 2 personnes sur 3 au cours de leur carrière.
Adaptez votre style de management
Pour éviter le repli de vos collaborateurs sur eux-mêmes et favoriser une coopération positive, il est essentiel de savoir quel type de management vous devez mettre en place.
Attention, on ne parle pas ici de faire des différences en fonction des personnes mais bien autour du contexte dans lequel se trouve votre collaborateur. 4 styles de management distincts et complémentaires à connaitre : Explicatif, Participatif, Délégatif et Directif.
Face à un collaborateur qui doute de ses capacités ou présente des signes du syndrome de l’imposteur au travail sur une tâche, identifiez si c’est la première fois qu’il le fait ou au contraire si c’est quelque chose qui est normalement acquis. Apporter un management adapté à la situation rassura à la fois votre collaborateur et lui permettra aussi de devenir autonome plus rapidement, tout en ayant son manager qui « vérifie ». Cette notion progressive permet de gommer ces phases de doute que peut ressentir « un imposteur ».
Après, à vous, de le jeter à l’eau et lui montrer que oui, il est bien en train de nager tout seul. Le but est de lui prouver qu’il a les compétences nécessaires et en profiter pour marquer son esprit pour qu’il arrête de se dire « oui mais je n’étais pas tout seul ».
Pour approfondir le sujet et savoir à quel moment vous devez passer d’un style de management à un autre : 4 styles de management à connaitre pour être un bon manager
Apportez de la reconnaissance à votre collaborateur
Cela ne concerne pas uniquement vos collaborateurs souffrant du syndrome de l’imposteur, même si cela va être un point particulièrement important pour eux.
Doutant de leur légitimité, apporter de la reconnaissance est essentiel pour chasser ce sentiment. Plusieurs types de reconnaissances à mettre en œuvre :
- Reconnaissance existentielle pour valoriser votre collaborateur lui-même (personnalité et qualité)
- Reconnaissance sur l’accomplissement du travail pour souligner les qualités et aptitudes professionnelles de votre collaborateur
- Reconnaissance concernant l’investissement personnel pour souligner la motivation et l’implication de votre collaborateur
- Reconnaissance en termes de résultats pour l’atteinte d’objectifs
Ces 4 types de reconnaissances favorisent l’épanouissement de vos salariés et permettent à vos « imposteurs » de prendre conscience de l’impact positif qu’apporte leur implication, travail et investissement.
Attention, toutefois, à ne pas couver votre collaborateur en minimisant par exemples ses erreurs. Il a peut-être le syndrome de l’imposteur mais il n’est pas devenu bête pour autant. Il va s’en rendre compte et se faisant il va perdre confiance en votre jugement. La reconnaissance que vous lui apporterez aura donc moins d’impact « il dit ça parce qu’il m’aime bien, c’est tout ».
Pour approfondir le sujet et savoir comment palier au manque de reconnaissance : Les bienfaits de la reconnaissance au travail
Faites des feedbacks régulièrement à vos collaborateurs
Le feedback permet également d’apporter de la reconnaissance à vos salariés. C’est un moment d’échange qui fait partie de la relation managériale avec vos équipes. En plus d’apporter de l’estime à vos collaborateurs, vous créez une relation positive de travail qui renforce in fine leur fidélisation.
Le feedback sert également à recadrer vos collaborateurs, c’est-à-dire quand ils sortent du cadre préétabli (objectifs, culture d’entreprise, etc.). Parce que oui dans reconnaissance, il y a reconnaître, et c’est tout aussi important de féliciter que de recadrer.
Pour vos collaborateurs qui souffrent du syndrome de l’imposteur, avoir ces échanges permettent d’identifier plus facilement leurs forces et leurs faiblesses et éviter ainsi de faire des généralités sur leurs compétences. Ils peuvent donc se concentrer sur des éléments que le manager a ciblés et arrêter de faire de la sur-qualité, chose qui peut être parfois contre-productif.
Pour approfondir le sujet et savoir comment construire votre feedback : L’art du feedback en entreprise
3 axes principaux qui permettent, avec le temps, de redonner de l’estime à vos collaborateurs qui subissent des phases de doute.
Conclusion sur le syndrome de l’imposteur au travail
Qu’est-ce que le syndrome de l’imposteur ? Si on met de côté les cas extrêmes (proche de la pathologie), c’est plutôt quelque chose de commun qui peut tout aussi bien vous toucher qu’un de vos collaborateurs. L’expérience de l’imposture n’est autre qu’une phase de doute qui pousse à vous remettre en question.
Bien managé et accompagné dans ces moments, vous pouvez faire de ce doute une force en évitant de vous reposer sur vos acquis et prendre de la hauteur.
N’ayez plus peur du syndrome de l’imposteur, composez avec pour assurer le bien-être de vos équipes et leur productivité.