Objectifs professionnels, pourquoi vos collaborateurs ne vous sollicitent pas ?
Parler carrière et objectifs professionnels est, culturellement, une démarche assez individuelle. Par habitude, votre collaborateur se lance dans une rétrospection personnelle grâce à différentes méthodes de développement et de coaching professionnel qu’on peut retrouver facilement en ligne.
Des objectifs professionnels fixés pour structurer sa carrière en mode SMART
Votre collaborateur va balayer 4 grandes thématiques pour formaliser ses objectifs professionnels :
- La motivation. Qu’est-ce qui me motive dans mon travail et dans mon environnement ? Est-ce que je veux travailler en équipe, manager une équipe, avoir des responsabilités, des challenges… ?
- L’intérêt professionnel. Qu’est-ce qui me plaît et me déplaît dans mes missions actuelles ? À quoi aspire-je ? Quel secteur et poste vise-je ? Qu’est-ce que j’ai envie de faire ? Qu’est-ce qui me passionne dans ce secteur ?
- L’équilibre professionnel et personnel. Quel rythme de vie je souhaite avoir ? Est-ce que je veux avoir des horaires flexibles ? Est-ce que je veux dégager du temps pour mon environnement personnel ? Est-ce que je veux investir du temps dans l’entreprise pour monter en compétences ?
- La projection sur long terme. Où est-ce que je me vois dans 6 mois, 3 ou 5 ans ? Quel est mon objectif de carrière ? Au sein de mon entreprise ?
Pour spécifier ses objectifs professionnels, il est conseillé d’utiliser la méthode SMART, efficace pour avoir des objectifs concrets, applicables et quantifiables. Un objectif professionnel SMART c’est quoi ?
Par exemple l’objectif professionnel de votre chef de quai logistique est de « devenir manager des opérations logistiques d’ici 2 ans ». Ou encore, votre project manager souhaite « enrichir son poste en faisant plus de recrutement ». Ce sont donc des objectifs professionnels à la fois spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporels. Si vous souhaitez creuser le sujet, lisez notre article : Fixer des objectifs SMART.
Pourquoi revoir ses objectifs professionnels maintenant ?
Regardons de plus près à quels moments vos collaborateurs vont se poser ses questions et vont chercher à redéfinir leurs objectifs professionnels.
Nous avons constaté 2 situations principales :
- À la fin d’un cycle. Après 3/4 ans en poste, votre collaborateur aura envie de renouveau et voudra sortir de sa routine, même s’il est performant. Comme à la fin d’un projet, il peut se demander ce qu’il a envie de faire après. Cela peut impliquer ses missions et les enjeux stratégiques de son poste au même niveau que ce qu’il peut apporter à l’entreprise. C’est un moment donc assez naturel pour se poser ces questions et réfléchir à ses objectifs professionnels.
- À la suite d’une émotion forte. Que ce soit de la déception à la suite d’un projet qui a échoué, un sentiment d’injustice, de l’incompréhension ou encore une dispute, l’émotion générée est généralement l’élément déclencheur qui va pousser vos collaborateurs à revenir sur leurs objectifs professionnels.
Ces moments, et c’est d’autant plus vrai pour le deuxième point, ne sont que très peu soulignés par les managers qui n’osent pas l’aborder avec leurs collaborateurs alors qu’ils perçoivent facilement ces signaux faibles.
Vouloir atteindre ses objectifs professionnels, synonyme de départ ?
Le fait de passer sous silence ces situations conforte vos collaborateurs à aller compenser leur insatisfaction autrement. Et, eux aussi, plutôt que d’ouvrir l’échange avec leur manager, vont rapidement aller voir si l’herbe n’est pas plus verte ailleurs.
Chose intéressante, Deri et Gilovich décrivent dans leur publication Journal of Personality and Social Psychology, à la suite d’une expérience menée sur plus de 3 000 personnes, ce mécanisme cognitif comme un processus de comparaison sociale pessimiste.
Si vos collaborateurs pensent donc qu’il est plus intéressant de partir, c’est grandement à cause de ce mécanisme qui biaise la représentation du poste qui les attire.
Imaginons que dans son poste actuel, votre collaborateur est à 85% satisfait de ses missions et de son environnement de travail mais il reste 15% (tensions managériales par exemple) qui le pousse à revenir sur ses objectifs professionnels. En regardant d’autres postes, il aura une vision plus idyllique et ne verra que les parties positives. Oui c’est assez rare qu’une entreprise qui recrute explique sur son site de marque employeur où sont les mauvais côtés d’un job, d’une organisation ou encore d’un secteur d’activité. Pour votre collaborateur, donc, on se rapproche des 100% de satisfaction, alors qu’en réalité et cela arrive trop souvent, il retombera à 60% une fois en poste ! Et vous le verrez rechanger de job quelques mois plus tard… si seulement il avait osé essayer de de coopérer avec son manager pour atteindre ses objectifs professionnels.
Au passage nous vous déconseillons, en tant que collaborateur, d’arriver en mode injonction avec votre employeur actuel, car vous êtes sous l’emprise de ce principe. Le fait de dire « c’est tant ou rien », avec en bonus « j’ai une proposition à ce niveau » n’est pas bien mieux que de partir fouler la pelouse voisine directement. Vous mettez en place à ce moment là un rapport de force qui empêche toute coopération saine et positive pour la suite.
Si vous travaillez dans une PME, sachez qu’avant de partir tête baissée vers d’autres opportunités, il y a beaucoup beaucoup de choses à faire, de place à prendre et de trajectoires possibles à dessiner. Et à vous aussi, managers, de montrer toute cette étendue à vos équipes. En PME, vos collaborateurs ne sont pas silotés uniquement dans leurs activités métiers. Au contraire, il y a beaucoup de transversalité que vous pouvez apporter pour enrichir un poste et vous aligner sur les objectifs professionnels de vos collaborateurs. Vous pouvez tout aussi bien transférer des responsabilités managériales et fonctionnelles à votre collaborateur tout comme lui donner des activités opérationnelles. Par exemple, votre responsable RH aime écrire, vous pouvez lui demander de s’occuper d’une partie des activités de la communication. Votre collaborateur continue à exercer son métier, tout en élargissement son spectre d’actions.
Même dans le cas où votre objectif est de rester 2/3 ans dans votre entreprise, soyez transparent auprès de votre entreprise pour que vous puissiez réfléchir ensemble à votre trajectoire de carrière. Moins de fuite donc et plus de coopération !
Passez de la théorie à la pratique
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Travaillez ensemble sur la réflexion des objectifs professionnels de vos collaborateurs
Ne vous limitez plus seulement à des systèmes d’évaluation qui sont centrés sur la récompense et pas assez sur la reconnaissance. Rappelez-vous, le manque de valorisation est l’un des 3 facteurs qui peut pousser votre collaborateur à partir.
L’évaluation regarde les actions passées et récompense uniquement le travail bien fait. Même si ça reste essentiel pour avoir une vision des compétences, ce système ne prend pas assez en compte le développement de l’individu ni de son potentiel. Et c’est ça qui va permettre d’ouvrir votre collaborateur à de nouvelles compétences à développer et de dessiner un nouveau champ de trajectoires professionnelles.
Ne nous méprenons pas, il faut bien les deux – l’évaluation et la reconnaissance – pour créer une ligne directrice pertinente qui permettra à vos collaborateurs d’atteindre leurs objectifs professionnels. Mêlez donc les processus classiques en intégrant la réflexion de leur carrière et de leurs objectifs professionnels.
Objectifs professionnels : abordez les en entretien professionnel obligatoire et en entretien individuel
Étant donné que l’entretien professionnel est une obligation légale, profitez en aussi pour aborder le sujet des objectifs professionnels avec vos équipes. Obligatoire tous les deux ans, cet entretien a pour but de gérer la compétence du salarié et de développer son employabilité. Il serait donc tout à fait normal que vous abordez les différents sujets qu’on a énumérés plus haut : missions, compétences développées, carrière, etc.
Une fois que vous avez posé les questions sur le bilan de l’année écoulée et des deux prochaines années à venir (comment avez-vous vécu l’année écoulée ? quels sont les faits marquants sur lesquels vous souhaiteriez revenir ? souhaitez-vous suivre une formation ? etc.), abordez la perspective professionnelle de votre collaborateur* :
- Quels sont vos objectifs professionnels ?
- Selon vous, que faut-il pour les atteindre ?
- Quelles évolutions envisagez-vous (en termes de responsabilités, de changement d’activité…) ?
- Quels sont vos atouts pour les atteindre ? Vos limites ?
- Quels sont vos besoins de formation à moyen terme ?
*Extraits du modèle de support d’entretien professionnel du ministère du travail disponible sur vae.gouv.fr
Prévoyez au moins deux heures d’échange pour ce type d’entretien et au moins une heure de préparation pour vous, en tant que manager. Pour savoir comment respecter précisément le cahier des charges de l’entretien professionnel, découvrez toutes les informations sur notre article comment construire et mener un entretien professionnel obligatoire.
L’entretien individuel et d’évaluation annuel (ou semestriel) permet de revenir quant à lui plus régulièrement sur les objectifs professionnels de vos collaborateurs. La trame, elle, est beaucoup plus libre que l’entretien professionnel obligatoire. À vous de cibler les priorités de cet entretien. Comme on l’a évoqué plus haut, se concentrer uniquement sur les actions n’amènera pas la reconnaissance que votre équipe recherche. C’est pourquoi, glisser une partie sur l’évolution professionnelle nous semble essentiel si vous voulez évoquer le sujet et que vos collaborateurs arrêtent de fixer leurs objectifs professionnels de leur côté. Comptez bien une heure d’échange et une heure de plus pour la préparation de cet entretien.
Les entretiens de ce type ont l’avantage d’être des échanges formels avec un temps dédié, mais avec le désavantage qu’ils ne soient pas spontanés ou fixés au bon moment. Par exemple, si votre collaborateur se pose des questions sur ses objectifs professionnels en janvier alors que l’entretien est en juillet, il cherchera à répondre à ses besoins avant, et aura sûrement entrepris des actions entre temps pour les atteindre.
Coopérez pour définir le champ des possibles et permettez à vos collaborateurs d’atteindre leurs objectifs professionnels
Aborder ces thématiques au quotidien, à travers différents moments comme une évaluation des valeurs ou d’un feedback sur un projet, permet de faciliter la coopération.
C’est un autre type d’exercice que vous pouvez manager régulièrement. Vous pouvez le faire quand vous voulez. En soi, c’est plus un prétexte pour échanger et connaître vos collaborateurs plutôt que de les évaluer.
Évaluer au quotidien
L’évaluation reste importante, notamment pour savoir où se situe votre collaborateur dans le référentiel que vous avez fixé en amont. Vous pouvez le faire de différentes manières : faire des feedbacks, donner de la reconnaissance ou encore programmer des points fonctionnels autour des problématiques précises. L’ensemble de ces actions vous permet de redéfinir les objectifs métiers (les missions, les projets, les responsabilités) en permanence et de permettre à vos collaborateurs d’atteindre eux aussi leurs propres objectifs professionnels. Vous évitez ainsi de créer des ancres et votre collaborateur devient une partie prenante de son évaluation ce qui lui permet d’ouvrir son champ des possibles plutôt que de chercher un autre pré ailleurs.
Connaître les valeurs de vos équipes
Appuyons-nous du référentiel d’une carte de 12 valeurs, qui n’est pas parfaite, mais qui sert de base pour cet échange et que nous utilisons nous même au sein de nos équipes. Les 12 valeurs en question : Amitié, Universalisme, Autonomie, Sécurité, Conformité, Hédonisme, Réussite, Tradition, Audace, Courage, Famille et Pouvoir.
En demandant à votre collaborateur de remplir « sa carte d’identité des valeurs » et de choisir parmi ces 12 valeurs 3 d’entres elles, vous avez déjà une grille de lecture sur ce qu’il recherche professionnellement.
Par exemple, s’il a classé dans ses trois premières valeurs « Réussite », « Pouvoir » et « Audace », vous pouvez lui demander s’il se projette en top management d’ici quelques années. Cet exercice est donc un excellent moyen, en début de parcours, pour mieux connaître votre collaborateur et discuter d’ores et déjà à quoi il aspire pour sa carrière. Vous pouvez bien sûr revenir dessus pour la réactualiser et refaire le point sur les objectifs professionnels de votre collaborateur.
Il faut accepter, toutefois, que les objectifs professionnels de votre collaborateur se fassent en dehors de votre structure. Vous devez, en tant que manager, mener correctement cette réflexion. Si la conclusion est que ses objectifs professionnels l’amènent vers d’autres horizons, autant le préparer en amont et éviter une fuite brutale.
Conclusion : les objectifs professionnels une responsabilité partagée
Pour penser une trajectoire professionnelle, il est intéressant, en tant que collaborateur, de coopérer et de participer aux différentes évaluations. Avant de tirer des conclusions hâtives en cherchant une solution de fuite, sollicitez vos managers pour qu’ils vous accompagnent dans votre réflexion. Ne soyez donc plus passif face à votre carrière et prenez là en main. Et soyez vigilants à ce mécanisme cognitif, car non vous n’accomplirez pas forcément mieux vos objectifs professionnels ailleurs.
Manager, ne pensez pas qu’il existe que deux solutions possibles entre la fuite et le statut quo. Vous pouvez proposer des solutions, intégrer votre collaborateur dans ce processus et évaluer également les portes de sorties. Prenez l’habitude de l’aborder à travers des échanges formels ou des moments du quotidien. Vous créerez ainsi une coopération positive qui vous permettra d’accompagner vos collaborateurs dans leur trajectoire professionnelle.
À vous de jouer maintenant !